
Réélu à la tête du PDCI-RDA : Tidjane Thiam n’a pas résolu ses problèmes, il les a déplacés ( Décryptage)
Lemandatexpress – Réélu à la tête du PDCI-RDA, mercredi 14 mai 2025, après une démission spectaculaire, Tidjane Thiam reste bien dans l’œil du cyclone malgré une vague de soutiens, tant au plan national qu’au sein de la diaspora.
Le double jeu démission-réélection orchestré par Tidjane Thiam, à l’effet de retrouver toute la légitimité à la tête du PDCI-RDA, n’a, semble-t-il, pas éradiqué tous les défis qui pèsent contre lui. Le soufflet de la contestation interne n’est pas retombé. Pas plus que la radiation de la liste électorale, qui reste bien d’actualité.
Seul candidat retenu au congrès électif express du 14 mai, décidé par le Bureau politique tenu 48 heures plus tôt, le successeur de Bédié a été une nouvelle fois plébiscité (comme lors du congrès extraordinaire du 22 décembre 2023 et de la convention éclatée du 16 avril 2025), élu à plus de 99 % des voix.
Un coup de poignard
Cependant, dans la foulée de ces assises, qui illustrent les convulsions internes au PDCI-RDA, Maurice Kakou Guikahué a démissionné de son poste de conseiller. Les raisons ? « Malgré cette profession de foi, des décisions majeures sont régulièrement prises au sein du Parti sans que je sois associé, consulté ou informé ; des décisions que je découvre dans la presse comme tout militant de base », a-t-il expliqué, précisant que les derniers développements de l’actualité politique au sein du PDCI-RDA, notamment la démission du président du Parti, en sont un exemple.
Cette décision de l’ancien secrétaire exécutif en chef est perçue comme un coup de poignard par une partie de l’opinion. Autrement dit, elle porterait en elle les germes d’une autre poche de discorde, même si Guikahué, dans sa note d’information, a dit rester au service du PDCI-RDA, qui représente, selon lui, l’âme de la Côte d’Ivoire.
Éliminé du congrès extraordinaire de décembre 2023 au motif qu’il était sous contrôle judiciaire, le cardiologue et ancien compagnon de Bédié s’était mis en marge des affaires du PDCI-RDA avant de refaire surface, puis de se voir nommé conseiller politique. Mais les raisons liées à sa démission montrent, ostensiblement, que sa nomination en janvier n’était qu’un simple vernis pour masquer les erreurs de casting commises par Thiam. Des approximations que plusieurs militants n’ont pas manqué de critiquer, aussi bien ouvertement qu’en coulisses.
Pas sorti de l’auberge
Autre élément de repère dans cette atmosphère agitée d’un PDCI-RDA où la popularité de Thiam peine à faire taire dissidence et incriminations : l’absence de plusieurs figures marquantes du parti au 19e Bureau politique. Cette réunion, qui aurait pu sonner l’union sacrée, a été snobée tant par Thierry Tanoh que par Jean-Louis Billon. Sans oublier Valérie Yapo, dont le procès contre la direction du parti, visant la démission de Tidjane Thiam, a été mis en délibéré au 22 mai.
À ces réalités factuelles s’ajoute le cri de désapprobation de Charles Tchétché. Le délégué départemental de Gagnoa demande officiellement la démission du président Tidjane Thiam, au plus fort même de sa reconduction. C’est à croire que l’ancien DG de Crédit Suisse n’est pas encore sorti de l’auberge, alors que les mobilisations en sa faveur s’organisent tant au plan national qu’à l’international. Hier vendredi, des militants de la diaspora ont manifesté devant le Parlement européen à Strasbourg, en France, pour dénoncer ce qu’ils considèrent comme une injustice faite à leur leader.
Tirer une croix…
Au-delà des problèmes internes au PDCI-RDA, c’est l’article 48 du Code de la nationalité qui constitue le plus gros écueil pour le polytechnicien. C’est, en effet, au regard de cette disposition légale que le petit-neveu d’Houphouët-Boigny a été radié de la liste électorale par une décision de justice en date du 22 avril. Même s’il a obtenu la libération de son allégeance à la France le 19 mars dernier, redevenant de facto exclusivement ivoirien, Thiam s’était auparavant inscrit sur la liste électorale en étant encore français. C’est ce qu’avait démontré récemment le directeur des affaires administratives et pénales du ministère de la Justice et des Droits de l’Homme, Augustin Kouamé, en réagissant sur la notion d’apatridie. Pas sûr que sa réélection, qui est postérieure à cette opération de révision de la liste électorale, puisse l’absoudre. À moins d’une nouvelle RLE avant la présidentielle — ce qui semble intenable selon la CEI — Thiam devra tirer une croix sur l’échéance d’octobre prochain.
Entrée dans l’histoire ratée
C’est en cela qu’un cadre d’un parti membre de la CAP-Côte d’Ivoire estime que le président du PDCI a laissé passer une belle occasion d’entrer dans l’histoire et de marquer viscéralement les esprits. « Thiam a été réélu, certes. Mais je crois qu’il serait sorti plus grandi de cette épreuve s’il laissait la place à quelqu’un d’autre en disant : “Je me mets au service du parti”. Il aurait suivi l’exemple d’Ousmane Sonko (au Sénégal), qui fait tache d’huile en Afrique aujourd’hui », fait-il remarquer.
Au lieu de cela, l’ancien ministre du Plan sous Henri Konan Bédié a fait le choix de persister dans sa voie. Ce faisant, il ne résout pas ses problèmes. Il les déplace. Du moins, pour l’instant.
Martial Galé





























