
Transports/Traoré Youssouf (Responsable d’une union des conducteurs routiers professionnels de poids-lourds) : « La signature et l’application de la convention collective va freiner les comportements dangereux de conducteurs sur nos routes »
La recrudescence des accidents de la route est redevenue un sujet d’actualité. Et pourtant, la Stratégie élaborée par le gouvernement afin de réduire le taux élevé de tués sur les routes, avait commencé à porter ses fruits. Traoré Youssouf, président de l’Union des conducteurs routiers professionnels des poids-lourds d’Afrique de l’Ouest, en Côte d’Ivoire (UCRPPLAO-CI) et premier vice-président de la section ivoirienne de l’Union des conducteurs routiers professionnels de poids-lourds en Afrique de l’Ouest (UCCRAO) se prononce. Par la même occasion, il donne des pistes de solutions dont, la signature et l’application de la convention collective pour freiner le mal
L’incivisme sur les routes est une véritable plaie en Côte d’Ivoire. A votre niveau, en tant que l’un des principaux responsables dans le secteur des poids-lourds, que faites-vous concrètement pour lutter contre ce fléau ?
Il faut d’abord retenir que, rien que l’Union des conducteurs routiers des poids-lourds d’Afrique de l’Ouest, en Côte d’Ivoire, nous revendiquons pas moins de 18 000 membres. Nos activités, d’abord, c’est la sensibilisation. nous sommes auprès des conducteurs pour soutenir leurs besoins, partout où besoin est. Nous intervenons quand il y a litige entre eux et les forces de l’ordre ; entre eux et les propriétaires de camions. Tout ce qui les touche, nous intervenons afin de porter assistance, en tant que responsables. Pour en revenir à la sensibilisation, il faut dire qu’elle n’est pas organisée, au cours d’une période précise, une période fixe. Nous sensibilisons à tout moment ; nous nous déplaçons vers différentes villes, aux frontières. Nous sommes sur le terrain à tout moment ; également, via les réseaux sociaux.
Malheureusement, après une chute, due à la mise en œuvre du de la Stratégie nationale de sécurité routière (SNSR) sur la période 2021-2025 devant permettre de réduire à au moins 25%, le nombre de tués sur nos routes, on constate une recrudescence des accidents de la voie publique, depuis quelque temps avec un bilan surtout humain, lourd. Quelle lecture faites-vous de cette situation ?
Merci beaucoup pour votre question. Malheureusement, c’est avec beaucoup de regrets et de mécontentements que je vais aborder ce sujet, vu la situation dans laquelle nous nous trouvons, ces derniers mois, en particulier. Il faut d’abord remercier le gouvernement, l’État de Côte d’Ivoire, à travers le ministère des Transports, qui a vraiment fourni beaucoup d’efforts, beaucoup de moyens, afin de pouvoir réduire le taux de décès sur nos routes. Et effectivement, on avait assisté à une baisse. Mais, depuis quelques temps, les accidents sont plus fréquents. Le bilan fait état de plusieurs morts dont des personnes calcinées. Nous sommes émus. Il y a plusieurs facteurs qui sont à l’origine des accidents dont le plus important est facteur humain. On peut également citer les problèmes mécaniques. L’Etat a formé beaucoup de conducteurs. Malheureusement, le Certificat d’aptitude de conducteur routier (CACR), certains ne l’ont pas eu. Aussi, quelque soit ton âge, il faut qu’on soit responsable au volant, en respectant notamment, le code de la route. Il faut aussi souligner que la tracasserie routière pousse certains, des jeunes surtout, à faire beaucoup de choses. Quand ils chargent, au lieu de faire le chemin dans la journée, ils préfèrent stationner pour attendre jusqu’à une heure où les voies sont un peu libre, par rapport aux nombreux barrages. Dès lors, ils s’engagent à vite effectuer leurs voyages avant les barrages ne soient, de nouveau érigés sur la voie empruntée. Une situation que nous déplorons. Mais, il faut aller plus loin pour trouver une autre raison, c’est que, 95% de ces conducteurs ne sont pas embauchés. Ils n’ont pas de contrat de travail. Ils ont un salaire en deçà du Salaire minimum interprofessionnel garanti ou SMIG (NDLR : le salaire minimum légal qu’un employeur doit verser à un travailleur en Côte d’Ivoire a été revalorisé depuis 2023, passant de 60 000 FCFA à 75 000 FCFA). Nous savons tous, combien coûte aujourd’hui, le loyer d’une deux pièces (chambre-salon) dans la ville d’Abidjan et sa banlieue. Pour quelqu’un qui a un salaire en dessous Smig, qui a une famille et qui doit payer le loyer, les factures de l’eau, de l’électricité ; il se dit qu’il faut faire plusieurs voyages pour pouvoir avoir un plus. Surtout, qu’il y a des transporteurs qui les encouragent avec des primes de voyage. Tout cela réuni, peut en notre sens, être des facteurs, à l’origine d’accidents.
Le constat est que, le cycle d’accidents semble avoir repris, en dépit d’énormes moyens déployés contre ?
Personnellement, je voudrais adresser ce message au Premier ministre, chef du gouvernement de Côte d’Ivoire ; qu’il remette le message au Président de la République, SE Alassane Ouattara. Aujourd’hui, dans notre secteur, nous déplorons la non signature de la Convention collective (Ndlr : La convention collective des transports en Côte d’Ivoire, notamment dans le secteur du transport routier, régit les droits et obligations des salariés et des employeurs. Elle aborde des aspects tels que les conditions de travail, les salaires, les primes, les indemnités). Si aujourd’hui, elle est signée, les chauffeurs seront embauchés et déclarés à la CNPS ; les contrats seront signés. Lorsque ces bénéficiaires sauront que, chaque fin du mois, ils ont un salaire qui leur permettra de subvenir à la charge de leur famille, ça les responsabilisera mieux. En outre, si, à la fin de leur carrière, ils auront une pension chaque trois mois ou alors, chaque mois, ils se sentiront davantage responsabilisés. Nous souhaitons que le chef du gouvernement puisse nous aider afin de pouvoir interpeller les acteurs pour la signature de la convention collective qui a été rédigée, depuis 2009. La sensibilisation et la formation des conducteurs doivent également être renforcé.
Entretien réalisé par
Mathias Kouamé






























