
Présidentielle 2025 : le jeu à cache-cache mal ficelé de Gbagbo et Thiam
Lemandatexpress – La présidentielle 2025 en Côte d’Ivoire se profile. Alors que Laurent Gbagbo, absent de la liste électorale, reste toujours fermé à l’idée d’un plan B en interne, le PPA-CI, son parti, investit le terrain pour le parrainage citoyen. Pareil pour le PDCI-RDA de Tidjane Thiam. Une démarche qui laisse transparaître une stratégie en sous-main de ces figures de l’opposition.
Après avoir longtemps brocardé la Commission électorale indépendante (CEI), allant jusqu’à appeler ses représentants au sein de l’institution à se retirer, le PPA-CI a surpris plus d’un en s’engageant activement sur le terrain de la collecte des signatures pour le parrainage citoyen en vue de la présidentielle. Ce, d’autant plus que, malgré l’inéligibilité de Laurent Gbagbo – radié de la liste électorale définitive – le parti n’a toujours pas adoubé l’option d’une pièce de rechange.
L’ancien chef d’État, candidat désigné par son parti en mai 2024 et volontairement déclaré pour les joutes d’octobre, reste, selon une rhétorique désormais bien rodée, le plan A, B et C de sa formation politique. Le 7 juin, à Petit-Bassam, Laurent Gbagbo, dans une sortie au vitriol, a réaffirmé son ambition présidentielle, se disant prêt à se battre jusqu’au bout pour y arriver. Il affirmait avec force : « Ceux qui ont fait la liste savent que je ne suis pas un voleur. Mais comme ils veulent qu’on se batte, on va se battre. »
Sera-t-il la tête de gondole du PPA-CI à la prochaine présidentielle ? Bien malin qui pourrait répondre à cette question. Si le nom d’Ahoua Don Melo a circulé ces derniers jours, à la suite d’un supposé tête-à-tête avec le Woody de Mama, l’idée reste difficile à confirmer en interne. « Le chef ne nous a encore rien dit à ce sujet. Il a engagé un combat : celui de sa réinscription sur la liste électorale et de sa candidature à la présidentielle. Jusqu’à preuve du contraire, la ligne n’a pas changé », assure un cadre du PPA-CI.
À ce combat s’ajoute celui visant à contester une éventuelle candidature du président du RHDP. « Celui qui veut faire un 4ᵉ mandat, on fera tout pour qu’il ne soit pas candidat », avait prévenu Laurent Gbagbo lors de son meeting de Petit-Bassam, dans le cadre de l’opération « côcôcô ». Aux dires des militants du PPA-CI, c’est plus qu’un impératif. Mais qu’adviendra-t-il si, éventuellement, Alassane Ouattara renonce à briguer un mandat supplémentaire et que, dans le même temps, Laurent Gbagbo reste inéligible ? « À chaque étape de la lutte sa stratégie. La direction avisera le cas échéant et donnera l’orientation qu’il faut pour la suite », nous dit-on, sans plus.
Longtemps esseulé depuis son appel de Bonoua (14 juillet 2024), Laurent Gbagbo a repris, plus ou moins, du poil de la bête en attirant dans son mouvement « Trop c’est trop » le PDCI-RDA de Tidjane Thiam, pour former un « front commun ». Les deux partis sont désormais logés à la même enseigne, avec des candidats potentiellement inéligibles. La raison de cette alliance aussi soudaine qu’inopinée serait, d’ailleurs, à rechercher dans cette communauté de destins entre Gbagbo et Thiam. Le président du PDCI-RDA, frappé en plein vol par sa radiation de la liste électorale, n’a eu d’autre choix que de coaliser avec son « ennemi » d’hier. Comme son homologue du PPA-CI, l’ancien ministre du Plan est, pour le PDCI-RDA, la seule candidature qui vaille. D’où le rejet catégorique et ferme de toute alternative, qu’elle s’appelle plan A’, B ou C.
Aussi, le parti doyen, grand pourfendeur de la CEI, s’est également soumis à l’épreuve du parrainage citoyen, ouverte le 2 juillet pour prendre fin le 26 août prochain. Dès lors, à mesure que la présidentielle approche, le flou s’épaissit tant sur la ligne du PPA-CI que sur celle du parti doyen. Les deux formations s’arc-boutent à leurs choix initiaux, qui sont, du reste, problématiques. Tout en s’inscrivant dans la poursuite du processus électoral.
Ne vont-ils pas, en fin de compte, se résigner à l’option d’un plan B ? Il semble, selon des indiscrétions, que Ousmane Sonko, le Premier ministre sénégalais, lors de son dernier passage à Abidjan, ait engagé ces deux figures majeures de l’opposition dans cette voie.
Mais s’ils partagent l’idée, Gbagbo et Thiam attendraient de connaître, au préalable, le porte-étendard de la majorité présidentielle. En effet, le RHDP, dont le choix s’est porté sur Alassane Ouattara, reste pour l’heure suspendu à la décision de ce dernier. Le président de la République a promis de répondre à l’appel de ses partisans dans les jours suivant le meeting de clôture du congrès ordinaire des 21 et 22 juin. Mais au moment où il s’envolait pour Paris, le vendredi 4 juillet, ADO n’avait toujours pas tranché.
Maître du jeu, le locataire du palais présidentiel joue la montre. Il est évident qu’avec ou sans lui, le RHDP peut présenter une autre armature. Mais le parti houphouëtiste garde une longueur d’avance, au regard de son occupation du terrain. Du coup, le PPA-CI de Laurent Gbagbo et le PDCI-RDA de Tidjane Thiam, qui semblent vouloir se déterminer en fonction du parti présidentiel, ont du pain sur la planche. À trop tergiverser, ils risquent bien de s’y prendre trop tard, avec des candidats limités dans le temps pour se forger une popularité. À moins de s’inscrire, in fine, dans une logique de boycott.
Martial Galé






























