La route, une pandémie dormante : ce qu’il faut retenir du lancement africain de la campagne mondiale de sécurité routière à Bouaké
Chaque année, le nombre stupéfiant d’accidents mortels liés à la circulation routière coûte la vie à 1,2 millions de personnes dans le monde. Cette pandémie silencieuse touche principalement les pays en développement où se produisent plus de 90% de ces incidents tragiques.
En réponse à ce fléau mondial, l’Envoyé spécial du secrétaire général des Nations Unies pour la sécurité routière M. Jean Todt en collaboration avec JCDECAUX et le ministère ivoirien des Transports piloté par le ministre Amadou Koné en collaboration avec Quipux Afrique ont procédé au lancement de la campagne mondiale des nations unies sur la Sécurité Routière à Bouaké les 2 et 3 mars 2024.
Au menu des assises de Bouaké, les messages de sensibilisation en présence des Ambassadeurs locaux de la sécurité routière et un panel sur la collecte des données des accidents de la circulation avec l’ensemble des parties prenantes engagées dans la lutte contre l’insécurité routière.
A l’issue des deux jours de travaux dans le cadre du lancement africain de la campagne mondiale de sécurité routière qui a eu lieu les 2 et 3 mars 2024 à Bouaké, les participants sont unanimes sur la poursuite de la sensibilisation à la sécurité routière mais et surtout sur la collecte des données fiables et exhaustives des accidents.
Au titre de la sensibilisation à la sécurité routière
La Côte d’Ivoire qui en réponse à la cible 3.6 de l’objectif de développement durable ( ODD) des nations unies de réduire de moitié le nombre de victimes des accidents de la route d’ici 2030, a initié des actions concrètes à travers la stratégie nationale 2021-2025 de sécurité routière adoptée le 7 juillet 2021, ne peut que se réjouir de l’engagement et du soutien des nations unies pour amplifier encore davantage sa campagne de sensibilisation avec JCDECAUX qui accompagne cette campagne mondiale.
Ainsi, en plus des dispositifs de communication existants, ce sont des affichages des messages des stars mondiales traduits en 30 langues qui seront diffusés durant deux ans ( 2023-2025) partout en Côte d’Ivoire et dans 80 autres pays et 1000 villes. Bien sûr, qu’il faudra poursuivre et intensifier les semaines nationales de sécurité routière dont la 14e édition a eu lieu en marge ce cet évènement le samedi 2 mars 2024 à Bouaké avec la distribution de 8000 casques et 8000 livres éducatifs sur la Sécurité Routière.
Les participants notent également la mobilisation de toutes les ressources humaines, matérielles et financières pour l’atteinte des objectifs de la stratégie quinquennale de sécurité routière ; l’intensification du contrôle des engins à deux et trois roues pour les infractions notamment les défauts d’immatriculation, de permis de conduire et de casques. Enfin, si la gouvernance de la sécurité routière doit être renforcée, il est urgent que la Côte d’Ivoire ratifie la Charte Africaine de la sécurité routière et toutes les autres Conventions des nations.
Au titre de la collecte des données des accidents
Le panel sur la Sécurité Routière organisé le dimanche 3 mars 2023, deuxième jour de l’événement s’est focalisé sur la collecte des données fiables et exhaustives des accidents de la circulation à Bouaké et en Côte d’Ivoire en général.
L’exposé inaugural sur l’importance de cette collecte, la table ronde sur le diagnostic du système de collecte des données et la présentation du projet pilote du cas de la ville de Bouaké ont permis de mettre en lumière l’importance d’une synergie d’action des acteurs impliqués aux fins de la prise de décisions éclairées.
Ainsi, les panelistes ( OMS, Oser, AMUGA, la gendarmerie, le GSPM, le ministère de la santé, ONPC, Quipux Afrique, le Ministère des Transports), sont d’accords qu’il faut définir un cadre de collaboration, un entrepôt qui regroupe l’ensemble des parties prenantes dans la collecte des données d’accidents de la route. Ils ont également noté la révision du Décret N*2017-68 du 1er février 2017 portant institution et organisation d’un système d’information sur les accidents de la circulation routière en Côte d’Ivoire. La digitalisation de la collecte, du traitement et de la diffusion des données des accidents ainsi que le renforcement des capacités opérationnelles de tous les acteurs ont été relevés.
Enfin, le projet pilote sur la collecte des données dans la ville de Bouaké a permis d’identifier six zones accidentogènes, notamment aux abords des écoles et des marchés mais également sur certains axes routiers de la banlieue. Les investigations auprès de la police, des sapeurs pompiers et des centres hospitaliers de Bouaké ont relevé en deux ans, 83 décès et 2200 blessés pour 300 accidents de la route.
Pour M. Emmanuel Bonnet, Enseignant chercheur à l’institut de recherche et développement ( IRD), chef du projet pilote sur Bouaké, il faut qu’au moins les trois entités ( police, Hôpitaux, sapeurs pompiers) qui sont propres à tous les pays du monde travaillent en synergie pour faire remonter les informations à l’OMS ( organisation mondiale de la santé).
« Le débat des chiffres n’est pas important »
Toujours selon l’expert Emmanuel Bonnet, par manque de données fiables et concertées, l’OMS est obligée d’ajuster les données avec des calculs statistiques et de modélisation qui eux, ont un effet inverse pour surévaluer les accidents. Aussi, le problème est que si on compte bien, on comptera plus. Ce qui signifie qu’on n’atteindra pas sûrement l’objectif de réduire le nombre des accidents.
Enfin pour lui, l’essentiel c’est de mieux compter ce qui se passe réellement pour mieux cibler les actions. C’est à partir de cela qu’on diminuera les accidents.
Le plaidoyer du ministre Amadou Koné
A ces recommandations ci-dessus, le ministre ivoirien des Transports Amadou Koné lors de son discours de clôture a insisté sur plusieurs autres facteurs à prendre en compte si la Côte d’Ivoire et les autres pays de la sous-région veulent atteindre les objectifs de l’ONU. Ce sont outre la collecte des données fiables des accidents , la peur du Gendarme, les équipements routiers, la qualité des véhicules ect.
« Au-delà des efforts nationaux, il est important d’avoir un cadre de concertation au niveau régional en vue d’harmoniser les règles de sécurité routière » a-t-il plaidé auprès de l’Envoyé spécial du secrétaire général des Nations Unies pour la sécurité routière Jean Todt qui note que la route est effectivement une pandémie silencieuse qu’il faudra combattre collectivement avant de saluer et féliciter le gouvernement ivoirien pour son leadership en matière de sécurité routière en Afrique.
Après Bouaké, Jean Todt est attendu en Mongolie et en Chine pour le lancement asiatique de la campagne mondiale de sécurité routière.
Sercom Ministère des Transports